« Marcelo ! Où est Marcelo ? Mon p’tit chien d’amoooour ! » Valentina ne se souciait pas de sa maison qui partait en fumée. Elle cherchait à tout prix à retrouver son chien, la prunelle de ses yeux. Puis de cette fumée épaisse, elle discerna une ombre. C’était la carrure importante de son mari, Rodrigo. Il semblait porter quelque chose dans les mains. Rapidement, elle remarqua que cela semblait touffu, bouclé.
« Oooh Rodrigo, merci ! Tu as sauvé mon Marc… » puis elle se tut. Choquée. Ce n’était point Marcelo. Mais des perruques. Plein de perruques.
« Désolé Valentina… mais les perruques quoi ! Il faut sauver les perruques ! Il y a des priorités dans la vie ! »
Lisboa est un jeu pour un à quatre joueurs de Vital Lacerda, qu’on ne présente plus. Remarquez, certains d’entre vous ont découvert le joli monde du jeu il y a peu. Alors pour vous, on va faire une légère exception. Vital Lacerda est un auteur portugais, très connu pour son jeu sur le vin issu des mêmes contrées, Vinhos. On lui doit aussi Kanban, où il est question d’usine automobile et, CO2 plutôt écolo, qui aura le droit à une jolie réédition. Et plus récemment, The Gallerist où les joueurs gèrent des galeries d’art.
Ici, comme son nom l’indique, le jeu va se dérouler à Lisbonne en 1755, peu après qu’un séisme, un tsunami et des incendies aient ravagé la ville. Ce sont des faits réels. Les joueurs incarnent des nobles influents qui veulent participer à la reconstruction de la ville. Pas pour faire une B.A, mais juste pour rentrer dans les bonnes grâces du Roi.
Avant d’attaquer les règles, petit passage obligé par le matériel. De manière générale, il est somptueux. Le plateau de jeu très bleuté, avec ce côté carrelé du plus bel effet. Le plateau Joueur, dit « portfolio », l’est également mais il est surtout très ergonomique avec des emplacements incrustés comme dans Scythe ou son centre moins épais afin de pouvoir y glisser des cartes. A ceci s’ajoute de jolis jetons. On ne s’attarde pas s’il vous plaît sur les Reis (ou Réal au singulier) la monnaie du jeu. Si vous n’êtes pas content, fallait opter pour les pièces métal. Na !
Du « vrai » Lacerda
Une partie de Lisboa se déroule sur 2 périodes, chacune divisée en un certain nombre de manches, déterminé par l’une de ces deux conditions : épuisement de 2/3 piles de cartes ou remplissage de 2/4 sets de débris. Pour l’instant ça ne vous parle pas, et c’est normal.
Nous n’allons pas détailler point par point les règles. Le lien en bas de page vous donne les règles en français. Remarquez, on pourrait s’arrêter là non ? Mouais pas sûr que ça plaise (et que cela passe auprès du rédacteur en chef)…
Ok, un peu de sérieux et revenons à nos moutons, ou plutôt à ces fameuses perruques.
Dernier aparté : Comme expliqué dans l’un des nombreux encadrés situés dans la règle qui donnent divers faits historiques, les perruques étaient très importantes au XVIIIe siècle au Portugal. Elles définissaient un peu votre rang dans la société. Un homme qui en possédait une multitude était riche, contrairement au simple commerçant qui en possédera qu’une toute sa vie. Du coup vous l’aurez compris, elles représenteront les points de victoire de ce jeu.
Donc la mécanique, dans les grandes lignes, est plutôt simple. A son tour, le joueur joue une carte afin de réaliser une action, et en pioche une. Rarement, si besoin d’Or (à ne pas confondre avec la monnaie du jeu), il peut défausser sa carte et passer son tour.
Le joueur actif a toujours en mains 5 cartes Politique. Elles sont de 2 types : Noble et Trésor. La carte Noble est disponible en 3 couleurs chacune représentant l’un des personnages clés du jeu : le roi, le premier ministre et le bâtisseur royal. La carte Trésor a diverses illustrations mais regroupe toutes celles qui ne sont pas Noble.
Le portfolio peut accueillir jusqu’à 3 cartes Noble et/ou bateaux sur la rangée du haut. Jusqu’à 3 cartes Trésor sur celle du bas.
Quelques précisions sur les cartes. La carte Noble est composée de :
– 1 enveloppe en haut qui indique des points d’influence
– 1 illustration du noble concerné et un texte d’ambiance au centre
– des bénéfices et des pénalités sur une flèche orientée vers le bas sur la partie inférieure
La carte Trésor :
– Bénéfices et subvention sur une flèche orientée vers le haut sur la partie supérieure
– action ou récompense au centre
– bénéfice sur les ventes
Le joueur peut jouer sa carte sur son portfolio ou à la Cour Royale. S’il joue un Noble ou un Trésor sur le portfolio, il le glisse selon le sens de la flèche, reçoit des bénéfices ou paie des pénalités, puis réalise l’une de ces deux actions : vendre des biens ou faire du commerce avec les nobles. Un noble posé indique un nombre de points d’influence que le joueur remportera désormais. Un Trésor donne quant à lui un bonus permanent (ex : obtenir 2 reis de plus pour la vente d’Or)
Vendre des biens permet de vendre des ressources (Or, Etoffe, Livre, Outil) sur l’un des bateaux à quai. Les bateaux se situent dans les emplacements supérieurs des portfolios des joueurs. Oui, vous pouvez vendre sur les bateaux des autres joueurs. En fonction du cours actuel du marché, vous vendez vos biens et les déposez dans les diverses cales disponibles. Si un bateau est rempli, son possesseur va gagner des perruques. Pourquoi remplir les cales des bateaux des autres joueurs ? D’une part parce que vous n’avez peut-être pas de bateau. Et oui, un bateau occupe un des trois emplacements du haut de votre portfolio. Sachant qu’en plus, en début de partie, vous n’avez que 2 emplacements dans votre portfolio (sur les 6 possibles plus tard), le choix est judicieux. De plus certains bateaux rapportent plus à la vente. A vous de voir…
Faire du commerce avec les Nobles sert à réaliser des actions d’état (acquérir des plans, rencontrer le cardinal, construire un bateau…) en échangeant des ressources. Vous pouvez le faire deux fois (mais pas deux fois la même).
Là où la vente permet de préparer son petit pécule, le commerce avec les nobles est important pour préparer les démarches futures, lors des rencontres, surtout avec les nobles.
Le joueur peut également jouer sa carte à la Cour Royale. S’il s’agit d’un Noble, cela signifie qu’il lui rend visite afin de réaliser son action Principale (Construire un magasin, Prendre un Décret ou Ouvrir un bâtiment public) moyennant de l’influence. Puis il peut aussi réaliser une action d’état correspondante sans donner de ressource. Point important : les adversaires qui ont des faveurs royales (un jeton spécifique) de la couleur du Noble choisi pourront aussi profiter du lieu (toujours durant le tour du joueur actif).
Sans rentrer dans les détails, construire permet de se positionner dans les divers quartiers de la ville afin de gagner des bonus mais surtout de remporter des perruques tout au long de la partie selon le quartier sélectionné, et ce grâce aux bâtiments publics. Il faudra idéalement essayer de faire correspondre les couleurs mais aussi choisir la bonne position orthogonale pour marquer un maximum de points et éviter d’en faire profiter les adversaires.
Les décrets sont des cartes qui donnent des objectifs de fin de partie pour gagner encore des perruques.
Si le joueur pose une carte Trésor à la Cour Royale, il va tout simplement gagner les ressources ou réaliser l’action indiquée.
Le joueur pioche ensuite une carte, prépare le plateau pour le joueur suivant. Si 2 des 4 piles disponibles sont épuisées, la première période s’achève. Une mise en place intermédiaire a lieu avec le changement de cartes politiques ou de nouveaux bateaux.
Ou alors cette nouvelle période arrive grâce aux débris. Il y a 3 types de débris (représentés par des cubes en bois) : marron pour la terre suite au séisme, bleu pour l’eau du tsunami et rouge pour les cendres à cause des incendies. Lors de la construction d’un magasin ou l’ouverture d’un bâtiment par exemple, le joueur va récupérer des débris qu’il posera sur son portfolio. Un set de 3 types différents lui permettra de débloquer 1 emplacement dans son portfolio mais aussi de pouvoir prendre plus de décret. Autre élément important à gérer !
Une fois la deuxième période achevée, un décompte de fin de partie a lieu et celui qui a le plus de perruques est déclaré vainqueur.
Comme le titre l’indique, ce jeu n’est pas à la portée de tous et il va falloir se creuser les méninges pour réaliser ses actions et objectifs. C’est du Lacerda quoi. Plus abordable que Vinhos, légèrement plus compliqué que The Gallerist. Mais après plusieurs parties et une certaine courbe de progression, on s’y habitue et on se familiarise avec les tenants et les aboutissants. Vous l’aurez compris, encore un très bon jeu de Monsieur Lacerda.
Recommandations : Il n’y a pas de texte sur le matériel et le jeu comporte une bonne iconographie. Accessible pour joueurs avertis.
Maintenant, à vous de vous forger votre propre avis.
La règle et les aides de jeu en français sur BGG
Le site de l’éditeur Eagle Gryphon Games
Rédacteur de l’article : Julien
Informations destinées aux personnes avec un handicap
En complément à nos articles, nous transmettons ci-dessous des précisions destinées aux personnes présentant une atteinte à la santé (visuelle, auditive ou déficience intellectuelle) :
– Ce jeu demande une bonne capacité de réflexion et semble peu compatible avec une déficience intellectuelle.
– Ce jeu présente une règle complexe et semble peu compatible avec une déficience intellectuelle.
– Ce jeu semble ne présenter aucune autre limitation particulière.