Bien que les jours s’égrènent inlassablement depuis la fin du FIJ 2019, la liste des jeux découverts sur place, méritant qu’on s’y attarde, ne s’est pas encore tarie. L’occasion aujourd’hui de vous immerger dans la conquête de l’espace avec l’excellent Space Explorers de l’éditeur Blam!
L’histoire de la conquête spatiale est aussi passionnante et remarquable, qu’elle n’est tragique par bien des aspects. Il est aisé de penser que de tout temps, l’homme a perdu son regard dans l’immensité du ciel, s’interrogeant sur la nature de ce tapis scintillant. En sus de se demander bien évidemment ce qu’il pouvait bien fichtre ici… Alors que l’histoire fut encline à y voir des divinités, le 19e siècle offre à l’homme une vision différente. Celle de l’évasion. Du mystère, du voyage par les écrits de Jules Verne et son fameux roman « De la Terre à la Lune » et des « Premiers Hommes dans la Lune » de H. G. Wells.
Avec l’invention de l’ampoule électrique par Thomas Edison en 1891, la fabrication du phonographe, du Kinétographe à défilement horizontal la même année, puis une suite de petites expériences de deux frères appelés « Lumière », il n’en fallut pas beaucoup plus pour que ces récits fantastiques n’inspirent ceux dont le talent consisterait à mettre des idées en image. C’est ainsi que le 20e siècle ouvre la boite de Pandore en offrant à l’homme une nouvelle saveur qu’il n’avait alors que gouté avec extrême parcimonie. Sans même lui donner cette appellation: la science-fiction. C’est le film de Georges Méliès, « Le voyage dans la Lune » qui propulsa l’homme dans l’espace sans que jamais ce dernier n’ait envie de toucher terre.
Le second conflit mondial donne l’occasion aux superpuissances et à leurs savants-fous respectifs, de faire joujou avec des fusées, gommant peu à peu la fiction au profit de la science. Ainsi, Von Braun donne naissance à la V2 en 1942, mettant le feu aux poudres et nourrissant par la même occasion ce qui deviendra un jour un brasier de tensions géopolitiques entre les blocs de l’est et de l’ouest. Mais cette rivalité, aïgue aux senteurs de paranoïa extrême, donne certes lieu à une sombre période au cours de laquelle une partie de l’humanité vécut en apnée dans l’attente de l’apocalypse nucéléaire, mais lui offre également une des plus grandes avancées scientifiques et technologiques de son histoire et une des principales réussites du génie humain : La conquête de l’espace.
Vous reprendrez bien un peu de Spoutnik ?
Space Explorers est un jeu de draft et de collection conçu par Yuri Zhuravlev (Viceroy, Catham City…) et illustré par Aleksei Kot (Lanterns: The Harvest Festival, Lucky Captain…). Conçu pour 2 à 4 joueurs dès 12 ans pour une durée de jeu moyenne de 45 à 60 min. L’opus est édité en français par Blam!
Dans Space Explorers, chaque joueur va être à la tête d’une équipe de recherche et de développement dans un centre fictif de recherche spatiale. Leur but consistera à engager les meilleurs spécialistes dans 5 domaines dans l’optique de développer les meilleurs projets spatiaux. Spécialistes et projets permettront aux joueurs de cumuler des points de prestige. Le jeu se conclura lorsqu’un joueur comptera 12 spécialistes dans ses rangs ou que tous les projets auront été développés.
3… 2… 1… Ignition !
Chaque joueur va disposer d’un emplacement de jeu personnel appelé « Hub R&D » (non, ce n’est pas pour Robert et Daniel…), structure qui lui permettra de développer ses recherches. Ce Hub est composé de 5 divisions (comprenez emplacements) qui font référence aux différentes spécialités (et donc spécialistes) qui pourront être développées au cours du jeu. A savoir, Ingénierie (bleu), Test (vert), Recherche (jaune), Construction (rouge) et Vol spatial (violet). Chaque joueur disposera également de 5 jetons de recherche qui serviront de monnaie ainsi que d’une carte spécialiste.
Une partie de Space Explorers se déroulera au tour par tour. À son tour, un joueur aura le choix entre 2 actions : soit prendre une carte spécialiste de CRS pour l’ajouter à sa main (où en piocher une du talon), soit recruter un spécialiste dans son hub. Pour finir, avant la fin du tour, il pourra, s’il le souhaite réaliser un projet – si tant est qu’il dispose des spécialistes nécessaires dans ses divisions… Mais voyons ça un peu plus en détails.
Prendre un spécialiste consistera simplement à s’approprier une carte, soit par intérêt personnel, soit éventuellement pour éviter que l’adversaire ne puisse se l’attribuer à son tour.
Recruter un spécialiste impliquera cependant quelques actions additionnelles. Primo, chaque spécialiste disposera d’une série de pictogrammes de compétence ainsi que potentiellement d’une série de capacités qui lui sont propres. Ces compétences/capacités motiveront évidemment le choix de leur recrutement. Notez également que la couleur du/des pictogramme(s) compétence déterminera la division pour laquelle le spécialiste pourra être recruté. Secundo, chaque carte disposera également de 2 à 6 symboles « Recherche » qui équivaudront au coût de recrutrement du spécialiste.
Si l’on résume, un joueur devra donc prendre en compte les compétences, les capacités éventuelles ainsi que le coût d’une carte pour recruter un spécialiste.
Cependant, une astucieuse petite procédure permettra potentiellement de réduire les coûts de recrutement, réduction qui pourra s’appliquer dès le second recrutement. Ainsi donc, si un joueur décide de recruter un nouveau spécialiste pour une division comportant déjà une (ou plusieurs) autre(s) carte(s), on réduira le coût de recrutement par le nombre de pictogrammes présents sur les spécialistes déjà recrutés.
Il reste alors à déterminer comment payer le coût d’un spécialiste. Et cela tombe bien puisqu’il s’agit de notre « tertio ». Il est possible de combiner 3 méthodes pour payer le coût d’une carte. Soit en transmettant un ou plusieurs jetons « Recherche » au joueur suivant, soit en plaçant dans le CRS un ou plusieurs spécialistes de sa main (chaque carte permettant de payer 2 symboles de son choix), soit en utilisant la capacité visible de certains Spécialistes présents dans le Hub du joueur concerné.
Capacité visible ? Houston, on a un problème !
Naaaan… Pas d’inquiétude à avoir… C’est tout bête ! Il s’agit là de la dernière petite subtilité du jeu. Comme indiqué précédemment, une bonne partie des spécialistes possèdera des compétences qui lui sont propres. Chaque fois qu’un nouveau spécialiste sera recruté pour une division, la carte viendra superposer partiellement la/les carte(s) déjà présente(s) et recouvrira in facto les compétences visibles de la dernière carte posée. Du coup, le concept de compétence(s) active(s) se résumera à celle(s) visible(s) sur la dernière carte spécialiste posée au sein d’une division. On pourra donc faire appel à cette compétence si nécessaire (ou souhaité).
Il ne restera alors plus que les Projets. Ces derniers sont tous munis d’un nombre de points de prestige relativement important qui auront leur importance lors du décompte final. Pour acquérir une tuile projet, il suffira de disposer du nombre requis de symbole compétence au sein de son Hub.
La partie se terminera lorsqu’un joueur recrutera un 12e spécialiste dans son Hub ou lorsque tous les Projets auront été achevés. Il ne restera alors plus qu’à comptabiliser le nombre de points de prestige de chaque joueur pour déterminer le vainqueur.
Un jeu qui vous envoie en orbite ?
Space Explores fait indubitablement penser à d’autres titres tels que Ganymede, Orbis ou Splendor pour ce qui est sujet au générateur de ressources que les joueurs tenteront d’optimiser pour pouvoir monter en puissance. Le jeu divergera cependant en bien des points, proposant une mécanique plutôt originale et bien équilibrée. Une montée en puissance impliquera nécessairement une accélération exponentielle dans le développement des autres Hub ; il s’agira donc de surveiller attentivement les autres joueurs sous peine de se laisser distancer…
Une certaine quantité de partie sera toutefois nécessaire pour se familiariser pleinement avec le nombre de pictogramme relativement important présent dans le jeu (une trentaine). Qu’à cela ne tienne, on se réfèrera simplement à la liste présente dans les règles.
La charte graphique délibérément vintage est très sympathique et se retrouve clairement être un atout pour le jeu. Dommage cependant que le thème reste un tantinet plaqué puisque nos rêves de conquête spatiale seront vite submergés par des considérations plus colorimétrique et symbolique.
Il n’empêche que Space Explorers est un jeu très intéressant qui donnera lieu à des parties tendues opposant des choix parfois compliqués, nécessitant aux joueurs de planifier, anticiper et offrant pour le coup des twists originaux. Les règles très accessibles et les superbes illustrations ancrées thématiquement permettront assurément au plus grand nombre d’y prendre plaisir.
Sorti il y a quelques semaines, Space Explorers est d’ores et déjà disponible en boutique pour moins de 20€.