Voyager, s’évader, visiter des lieux propices à la rêverie, à s’inventer de nouvelles vies d’aventures… Small Islands est justement de ces invitations au voyage dans un archipel merveilleux qu’il ne tient qu’à nous de créer et de réinventer partie après partie. Embarquons, intrépides explorateurs, pour de bien beaux rivages ! Prenons part à l’impitoyable course à la découverte qui se joue dans ce jeu de pose de tuiles bien plus stratégique qu’il n’y paraît.
Destination évasion
Issu de la jeune maison Mushroom Games et distribué par Pixie Games, Small Islands est sorti le 26 octobre 2018 en six langues. Français, Anglais, Allemand, Chinois, Japonais et Coréen !
Tout le monde s’accorde sur un point, Small Islands est super beau et brillamment illustré par Aurélie Guarino. C’est aussi une franche réussite éditoriale avec une boîte aussi soignée à l’extérieur qu’à l’intérieur. La couverture nous fait plonger dans une illustration qui pousse à la contemplation : on vole près d’une mouette au dessus d’un archipel boisé, abritant des ruines antiques et ceint d’une mer turquoise sur laquelle sillonnent des voiliers colorés. Cette image hypnotisante donnerait presque envie de laisser la boîte fermée pour se laisser aller à la contemplation, mais rassurez-vous, le meilleur est à l’intérieur. Tout le matériel est rangé dans deux compartiments séparés par un ponton en carton, le tout intégré à une grande illustration. Question immersion, on est servis !
Jetons un œil aux éléments de jeu, également illustrés : les cinquante-six tuiles Paysage promettent la composition de jolis archipels et sont ornées de logos représentant des ressources : fruits du Dragon, feuilles d’Arka, fleurs de Lotus, temples et ports en bord de mer. Elles sont accompagnées de quatre tuiles Départ recto-verso différenciées par une mouette. Une tuile Navigation et quatre tuiles Bateau permettront d’initier les phases de comptage de points de prestige, le but du jeu étant d’en gagner le plus possible. Douze cartes Objectif, douze cartes Mission et Douze cartes Récompense répartissent les enjeux de la partie, ainsi que dix-huit cartes pour le mode solo car oui, il y en a un ! Quelques dizaines de jetons cartonnés servent au comptage des points ou bien de joker pour vous aider à réaliser vos objectifs. Enfin, chaque joueur reçoit huit ravissantes petites maisons en bois de formes et de couleurs différentes pour chacun des joueurs.
Le jeu est rapide à mettre en place et chaque partie dure en moyenne 30 à 45 minutes, pour un à quatre joueurs. Le seul “problème”, c’est qu’on a souvent envie de relancer une partie aussitôt…
Comme énoncé un peu plus haut, le but est de cumuler le plus de points de prestige en remplissant l’objectif de la carte mission reçue sur le plus d’îles possibles. Chacun à leur tour, les joueurs vont donc poser des tuiles Paysage de manière à composer des îles qui correspondent à leur objectif de mission.
Les quatre tuiles Départ, celles avec la jolie mouette, permettent de composer un archipel de départ, ce qui fait un nombre énorme de possibilités différentes ! On pose donc ces quatre tuiles au centre de la table, de manière plus ou moins aléatoire.
Îlots-trésors
Prenons maintenant l’exemple d’Elsa qui, hier encore, était sur l’île de Pâques. En tant que joueuse ayant le plus récemment quitté une île, elle est la première à jouer. Son objectif pour la première manche est le suivant : découvrir (donc créer) des îles qui comptent plus de fruits que de feuilles. Elle pioche donc une des trois tuiles placées face visible sur la table, qu’elle remplace par une des six disposées face cachée sur la tuile Navigation.
Tous les joueurs ayant reçu deux tuiles Paysage à la mise en place, elle en a désormais trois en main. Parmi celles-ci, elle en choisit une qu’elle ajoute aux tuiles de départ au centre de la table, comme des dominos qui créent un paysage cohérent. En plus de contribuer à explorer un superbe archipel, Elsa favorise la réalisation de son objectif en créant des îles qui vont compter plus de fruits que de feuilles.
C’est ensuite à Lucas de jouer et son objectif est le suivant : créer des îles avec autant de fruits que de fleurs. À son tour, il pioche une tuile, en retourne une pour compléter la pioche et poursuit la “découverte” de l’archipel en posant une des trois tuiles qu’il a en main.
Au bout de six tours de jeux, la pioche située sur la tuile navigation est épuisée et les joueurs suivants peuvent désormais continuer à jouer leur tour normalement ou, s’ils estiment avoir suffisamment rempli leur objectif, il peuvent se saisir de la tuile Bateau de leur couleur, ce qui met fin à la manche en cours. C’est la phase d’Accostage. On compte alors les points de chacun dans l’ordre du tour, points qu’ils valident en posant une des ravissantes petites maisons en bois sur les îles sur lesquelles ils ont atteint leur objectif.
Après la phase de comptage, on entame une nouvelle manche en reprenant l’archipel où on l’a laissé, chacun suivant un nouvel objectif. La partie se termine ainsi à la fin de la quatrième manche ou à l’épuisement des pioches. Chaque joueur a donc l’opportunité de stopper une manche quand cela l’arrange et ainsi faire basculer le score en sa faveur.
Des variantes à l’archi-pelle
À ces mécaniques de base s’ajoutent pas mal de petits paramètres en plus qui enrichissent le gameplay, comme par exemple les ancres situées près des côtes et qui ajoutent des points à la fin de la partie à la condition que votre tuile Bateau soit située près d’elles.
Les jokers, quatre jetons recto-verso pour chaque joueur, représentent un double bonus pour chacune des ressources. Il peuvent être placés, un par un, où bon vous semble sur le plateau. De quoi faire rager les explorateurs concurrents, on vous le garantit !
À noter également que jouer à deux ou à trois ajoute plus de possibilités pour chaque joueur de mettre fin à la manche en cours puisque quatre tuiles Bateau sont disponibles quel que soit le nombre de joueurs. Ainsi, en plus du bateau de notre couleur, on pourra se saisir d’un bateau neutre pour couper l’herbe sous le pied de ses adversaires une nouvelle fois. Oui, c’est moche, mais que voulez-vous ?
Après quelques parties, on troquera les douze cartes Objectif contre deux tas de douze cartes : les Missions et les Récompenses. On pioche ainsi aléatoirement les trésors à percevoir et idem pour les missions. Cela évite de remplir toujours les mêmes conditions parce qu’on les sait rentables et renouvelle durablement le jeu. Ce mode dit “avancé” introduit aussi de nouvelles cartes impliquant d’autres défis et méthodes de gains de points de prestige destinés à des joueurs résolument plus chevronnés. Depuis le début, on avait la puce à l’oreille : sous ses dehors paradisiaques, Small Islands n’évoquait pas pour autant une balade dominicale en famille. Force est de constater qu’avec ce mode supplémentaire, Mushroom Games s’adresse à des joueurs tout à fait confirmés.
Enfin, quand vous aurez atteint un certain nombre de conditions de victoires telles que soixante points de prestige en une partie, avoir placé toutes vos maisons, compter douze îles d’au moins deux tuiles chacune, etc… le jeu vous réservera encore une surprise de taille, confirmant une fois de plus sa capacité à capter l’attention des plus joueurs d’entre nous. Malheureusement —enfin non en fait c’est plutôt chouette— on ne peut rien vous révéler de plus, ce serait gâcher un effet des plus agréables !
Un mode pour les Robinsons
Il est un exercice compliqué auquel se livrent de plus en plus d’auteurs et d’éditeurs, celui d’adapter leur jeu aux joueurs solo, qui forment un public de plus en plus important. Là encore, Small Islands brille d’astuce avec ce mode particulièrement réussi dans lequel on jouera contre Alexis. L’auteur du jeu, Alexis Allard nous gratifie ici d’un petit “caméo” bourré d’humour et prête son nom à l’IA qu’il nous faudra battre au cours de nos parties en solitaire. Pour ce faire, deux pages de règles bien aérées et un nouveau paquet de cartes permettent de jouer de manière aléatoire les tours de cet automate avec une précision saisissante. Au cas où vous trouveriez cela un peu facile, notre joueur fictif ne compte pas moins de… six niveaux de difficulté.
De quoi vous donner des sueurs froides pendant un sacré moment, le tout à bord d’un joli bateau dans un archipel charmant au possible. Si, si, c’est possible, il est costaud le bougre.
Île en faut peu pour être heureux
Le joli Small Islands en a sacrément sous la grande voile ! C’est mignon, ça se la joue petit jeu de pose de tuile, mais que nenni ! Au lieu de ça, on a un jeu complexe et subtil avec une marge de progression forte tant les possibilités sont nombreuses et les variantes enrichissantes. Stratégie, bluff, coups tordus, programmation, stop ou encore, tous ces ingrédients sont dans Small Islands, encore une fois servis par un design très réussi et qui respire la légèreté et les mythologies antiques.
Pas très compliqué à prendre en main, il n’en reste pas moins difficile à maîtriser, comportant une importante marge de progression dans le temps. Cela en fait notamment un excellent tremplin pour qui s’éloignerait peu à peu des rivages tranquilles des jeux familiaux en lorgnant vers ceux, mystérieux mais tellement attirants des jeux plus techniques.
Conception et production au top, espièglerie et perfectionnisme des développeurs, profondeur de jeu autour d’un concept simple, progressivité, rejouabilité et mode solo soigné, tout cela est très réjouissant et fait de Small Islands un de nos coups de cœur de cet hiver. Bravo !
Maintenant, à vous de vous forger votre propre avis.
La règle du jeu en français
La fiche du jeu sur Board Game Geek
Le site de l’éditeur Mushroom Games
Rédacteur de l’article : Arthur
Informations destinées aux personnes avec un handicap
En complément à nos articles, nous transmettons ci-dessous des précisions destinées aux personnes présentant une atteinte à la santé (visuelle, auditive ou déficience intellectuelle) :
– Ce jeu demande une bonne capacité de réflexion et semble peu compatible avec une déficience intellectuelle.
– Ce jeu semble ne présenter aucune autre limitation particulière.